La recherche en français : un bilan préoccupant
Le réseau scientifique Acfas a dévoilé ce midi, lors d’un événement virtuel, les conclusions d’une enquête de deux ans sur l’état de la recherche réalisée en français au Canada. À la grandeur du pays, 35 410 francophones enseignent au niveau postsecondaire, dont 7615 hors Québec. Quel portrait de la situation brossent ces titulaires d’un poste de professeur, de chargé de cours ou d’assistant d’enseignement ?
Les résultats sont là, et ils n’ont rien pour nous réjouir. Le monde de la recherche subit une forte pression pour travailler et publier en anglais, lingua franca de l’érudition à l’époque actuelle. Cela, on le savait. Mais à ce point ? Depuis les années 1960, seulement 10 % des revues créées au Canada sont d’expression française. La proportion des articles parus dans cette langue décline, mais aussi celle des demandes de subvention adressées aux organismes fédéraux. Tous les domaines sont touchés, même les sciences humaines, bien que celles-ci soient protégées par leurs liens étroits avec l’identité nationale. Plus inquiétant encore : dans les disciplines de la santé, rédiger une demande de subvention dans les mots de Molière réduit statistiquement les chances de l’obtenir, quel que soit le groupe d’appartenance linguistique de la personne qui la signe !
Parmi les 515 professeures et professeurs sondés, 65 % estiment qu’une recherche menée en français reçoit moins de reconnaissance et visibilité ; 42 %, que sa publication est jugée moins importante ; et 34 %, qu’il existe peu d’aide pour déposer des demandes de subvention.
Il est vain d’espérer contrer l’attractivité de la langue anglaise. Cependant, il est encore possible d’appuyer les communautés francophones qui contribuent à générer des connaissances au Canada. Les auteurs y vont de neuf recommandations pratiques. La première consiste à implanter un service d’aide à la recherche en français (SARF). Sous l’égide de l’Acfas, ce programme offrirait un soutien au dépôt de demandes de subventions ainsi que des mesures de diffusion et de valorisation du savoir acquis dans le second idiome officiel du Canada.
« Cette mesure nous paraît prometteuse. Nous nous mettons à la disposition de l’Acfas pour examiner le rôle que les professionnels et professionnelles de recherche pourraient y jouer », commente Claude Fortin, présidente de la Fédération du personnel professionnel des universités et de la recherche (FPPU). « Par ailleurs, 55 % des participants à l’enquête estiment difficile d’avoir accès à un assistant qui maîtrise le français. C’est une réalité préoccupante à nos yeux, car cette catégorie d’emploi appuie massivement l’organisation de la science au quotidien. Nous suivrons l’évolution de la situation dans les années à venir. »
L’événement en ligne Vitrine des savoirs, qui vulgarise des études menées par des francophones d’un bout à l’autre du Canada, se poursuit tout au long de la semaine. C’est ouvert à tout le monde.